Logement Santé : l’impact des matériaux et matériels

Il y a quand même un petit moment que je suis architecte et je sais d’expérience que le bâtiment a toujours été perçu comme un gros pollueur. Il y a eu la problématique du plomb, puis celle de l’amiante… et nous pourrions nous questionner sur les problématiques à venir en termes d’isolants – isolants en laine minérale – ou sur les conditions dans lesquelles travaillent les ouvriers sur les chantiers. Le bâtiment a toujours été le mauvais élève dans le domaine.

A la différence du secteur l’industriel, en architecture, chaque chantier est un chantier pilote, avec très peu d’industrialisation. De ce fait, le Logement Santé – la démarche santé dans le logement plutôt – va toucher un grand public parce que, le logement, c’est ce qui concerne le plus le public. Les équipements publics, cela parle moins, les gens se sentent moins concernés. Ce qui intéresse les gens, c’est leur cellule, leur habitat. Développer cette démarche santé dans le logement plutôt que la développer dans les équipements publics me semble le bon procédé pour enlever cette image de gros pollueur au bâtiment.

La pollution par les matériaux, une prise de conscience récente

La mise en place de cette démarche ne peut se faire qu’avec les industriels, parce que la pollution provient en tout premier lieu des matériaux bien entendu. C’est récemment, à partir de 2012, que les industriels ont dû prendre en compte les polluants au niveau de la qualité de l’air, et étiqueter leurs matériaux.

C’est une première démarche, et le début de ce que nous avons pu mettre en place par la suite. Sans le classement des matériaux, nous ne pouvions rien faire. Pour autant, si ce classement a l’avantage d’exister, ce n’est pas une règle d’or, c’est-à-dire que chaque matériau à son classement et les fabricants viennent enrichir une base de données – l’INIES – qui recense les données de référence environnementales et sanitaires pour le bâtiment et nous aide à choisir nos matériaux.

Peu de visibilité sur les effets de l’assemblage des matériaux

Mais, à la lecture de l’INIES, nous ne savons pas encore pas ce que va donner l’assemblage de ces matériaux. Chaque fabricant travaille sur son propre produit et nous, quand nous utilisons ces produits, nous les assemblons. Prenons l’exemple d’une colle, qui va avoir son classement, et le revêtement de sol qui va avoir le sien : quand nous associons les deux, normalement, d’après ce que nous disent les documentations, l’assemblage des deux va rester dans le classement des deux. Ça s’additionne bien. Par contre, la mise en œuvre des deux, les conditions de mise en œuvre, l’hygrométrie, l’hyperventilation des locaux pendant la phase chantier peut dégrader ce classement.

Moi, je me refuse à prendre pour argent comptant le classement propre du produit. Nous sommes encore dans les prémices de tout ça et ce n’est pas nous, architectes, qui allons pouvoir en tirer les conclusions. Ce que nous pouvons faire, c’est nous documenter ; ce que nous pouvons faire également, c’est rester prudents. Nous progressons, mais nous ne pouvons pas donner carte blanche, ou être certains de ce que nous allons livrer à la fin.

La réglementation en termes de matériaux, je pense qu’elle pourrait aller plus loin, mais c’est en cours. Je parle des matériaux, mais il y a également un autre volet qui est très important, ce sont les matériels, c’est-à-dire tout ce qui est équipement… systèmes de ventilation, systèmes de chauffage. Ça vient compléter les matériaux.

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